jeudi 18 avril | 11:39

Yatai Rāmen

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Je ne pouvais pas passer à côté du chef James Shi, issus de la promotion 2018 de l’institut Paul Bocuse, qui met à l’honneur son savoir-faire étoilé dans sa passion pour le plat populaire : le ramen. En attendant d’accueillir ses clients sur place, il présente le concept de Yatai Ramen en vente à emporter, avec les kits ramen à assembler soi-même.
Mais James n’attend qu’une chose : servir ses clients dans son nouvel établissement flambant neuf, avec des produits artisanaux et de saison afin de transmette son admiration pour le Japon.

Avant de vous présenter l’entretien que j’ai eu avec James, voici le menu que j’ai pu déguster grâce aux kits ramen proposés.

J’ai commencé avec une entrée, les gyozas végétariens, que je conseille vivement même pour les petites faims qui souhaitent goûter au ramen ensuite. La farce est vraiment excellente, on ressent forcément les légumes frais qui ont servi à garnir cette fine pâte à gyoza. Déjà ravie de cette première dégustation !

Gyoza végétarien

Je voulais surtout tester le ramen du moment, différent chaque mois. Ce fut un ramen épicé au poulet, et le mélange avec le bouillon clair de poulet adoucit le tout et rend ce ramen très subtil, avec la touche végétale que l’asperge et la roquette apportent au plat. Les adeptes de la cuisine relevée seront conquis !

Le ramen du moment : nouilles ultra fraîches bio maison,
bouillon Tori-Chintan clair de poulet mijoté dans le respect du procédé traditionnel japonais, assaisonnement tare Shio (sel de Guérande) retravaillé, poulet haché spicy miso, asperge confite au citron, roquette
cébette, sésame.

Puis le troisième et dernier plat, le ramen traditionnel qu’il faut goûter pour découvrir la vision du chef sur ce ramen conventionnel. Le bouillon était très onctueux mais pas trop lourd, ce que je ressens quelque fois dans certains plats de ramen. Un classique pour ma part très maitrisé, avec une portion généreuse de bambou (que j’adore) et de belles tranches de porc chashu mariné.

Ramen traditionnel : nouilles de blé bio maison, bouillon Tonkotsu de porc mijoté dans le respect du procédé traditionnel japonais, assaisonnement tare Shoyu (soja) retravaillé, tranches de porc chashu, feuilles d’algues nori extra croustillantes, oeuf frais bio mariné, pousses bambou menma, cébette, sésame.

Un délicieux repas spécial ramen que l’on peut préparer à la maison grâce aux kits. Surtout bien chronométrer la cuisson des nouilles fraiches, l’élément star du plat, afin d’obtenir la cuisson parfaite que le chef souhaite que l’on expérimente. Proposer un ramen du moment est une belle idée qui permet de nous faire attendre avec impatience quelle sera la prochaine inspiration du chef selon les produits que la saison aura à nous offrir !

Box ramen kits

 

Curieux d’en connaître davantage et savoir qui se cache derrière ces créations ? Je vous laisse alors lire mon entretien avec le chef de Yatai Ramen, James Shi.


Interview de James Shi, Chef de Yatai Ramen

  • Quel est ton parcours ?

Depuis mon enfance, j’ai toujours baigné dans le milieu de la restauration car mes parents tenaient un restaurant asiatique en Bourgogne. La passion pour la cuisine a toujours été présente, malgré mon parcours en médecine puis mes études de kiné. J’ai compris que ce domaine n’était pas fait pour moi et que j’aspirais à autre chose. Je me suis reconverti dans la restauration grâce à l’Institut Paul Bocuse qui m’a beaucoup appris et a confirmé mon projet de reconversion. J’y ai rencontré ma compagne (qui est en cuisine avec moi au Yatai Ramen) puis nous avons travaillé dans plusieurs restaurants étoilés comme La Tête d’Oie à Lyon et chez Pierre Gagnaire, au Lucas Carton et au Gabriel à La Réserve.

Quelques mois après l’obtention de mon diplôme en 2018, ma compagne et moi ouvrons notre premier restaurant de la même gamme que mes parents : un buffet à volonté à Lisses, qui se différencie des autres par une recherche de l’offre plus élaborée. Ce restaurant connut un grand succès malgré sa localisation. L’image que véhicule l’Institut Paul Bocuse a fait beaucoup et je voulais changer l’image du buffet à volonté que l’on retrouve partout. En juste 3 mois, sa renommée a explosé autour de Lisses. Et il fonctionnait très bien jusqu’au premier confinement… Nous avons tout de même continué durant la pandémie et il fonctionnait toujours aussi bien. Durant la première partie du confinement, nous avons proposé des bao car c’était la tendance du moment, puis nous avons rouvert entre juillet et octobre.

Avec ma sœur, co-gérante pour la partie salle, j’ai racheté le Yatai Ramen entre les deux confinements (en été 2020). Mais je ne m’attendais pas un à un second confinement… Nous avons commencé les travaux mais la durée du confinement trainait. Nous ne voulions pas attendre de proposer notre offre sur place et avons décidé de commencer la vente à emporter.

“Silence, on ramen” hommage à Paul Bocuse qui aimait dire “Silence, on cuisine”

  • Avais-tu pour idée en tête de créer ton restaurant durant tes études à l’Institut Paul Bocuse ?

Oh oui ! Dès que j’ai commencé l’Institut Paul Bocuse, j’ai toujours su que je voulais ouvrir mon propre restaurant. Pouvoir diriger ma cuisine, ma brigade, c’est ce que j’ai souhaité dès le premier jour. L’Institut m’a permis de me projeter dans ces projets et d’obtenir un bon bagage culinaire.

  • D’où vient ton admiration pour la cuisine japonaise ?

J’admire énormément la gastronomie japonaise de par ses techniques, la philosophie japonaise m’intéresse beaucoup à la base. Ce côté carré et perfectionniste est ce que j’adore, autant dans les techniques et dans les façons de travailler. C’est tout un ensemble qui fait qu’on accroche sur leurs produits et c’est ce qui me fait aimer cette cuisine. Les deux chefs avec qui j’ai travaillé, Julien Dumas et Jérôme Banctel, sont très inspirés des techniques et des produits japonais en y ajoutant leur fond de cuisine française. C’était autant un plaisir de travailler avec eux en cuisine que de déguster les plats.

La cuisine française, raffinée de base et très technique, a rencontré la cuisine japonaise qui insuffle les mêmes valeurs mais venant de l’autre bout du monde. Ces deux gastronomies fusionnent très bien ensemble.

  • Quelles-ont été tes inspirations pour concevoir Yatai Ramen ? Comment est venue l’idée de ce concept ?

Depuis tout petit, le ramen a toujours était le plat familial par excellence. Ma grand-mère en mangeait au petit-déjeuner, au goûter, au dîner… c’était ramen à toute heure ! Enfants, avec ma sœur, nous avons toujours baigné dans ce plat emblématique. C’est un plat traditionnel qui plait à tout le monde et qui se mange à tout moment. En Asie en général, c’est un plat que l’on mange partout et au Japon, certains restaurants de ramen sont ouverts 24h/24h. Qu’on soit homme d’affaire, pour le plaisir durant le week-end, après le travail… on peut en déguster tout le temps ! Le quartier animé de la rue du Faubourg Saint-Honoré correspond bien à cette vision, entre les bureaux et les magasins, il y a du passage… Je voulais faire un mix entre la cuisine japonaise et française, le ramen me le permet en y incorporant les techniques de cuisine française que j’ai appris au cours de ma formation.

Lorsque j’ai fini l’école, je cherchais un peu ce que je voulais faire. Continuer dans l’étoilé qui est un domaine très intéressant, mais plus difficile physiquement et mentalement. J’ai ouvert le restaurant à volonté et j’ai comparé le monde étoilé et cet environnement-là. J’ai réalisé qu’il fallait que je trouve un juste milieu et le type d’établissement qui me ressemble. On propose un beau buffet à volonté mais c’est un autre plaisir de créer une carte pour un restaurant, travailler plus de produits de saison…

Bols et assiettes, poteries réalisées par Marion Graux

  • Quel est le processus de création pour tes nouveaux ramens ?

Principalement la saisonnalité des légumes que je suis à la lettre. Mes inspirations et mes influences viennent des rencontres de tous les jours, ce que je vois des grands chefs, de ce que j’ai appris et de ce que j’aime manger avant tout. Toutes les nouvelles idées sont discutées avec ma compagne et ma sœur et on avise ce qui pourrait plaire en faisant des essais. Nous proposons le ramen du moment, qui change tous les mois. Chaque élément du plat change, les légumes, le bouillons, le tare et l’huile varient. L’enseignement que l’on a reçu à l’Institut, nous l’appliquons chaque jour dans notre manière de cuisiner et de créer nos plats.

  • Comment se-sont passées tes expériences dans les écoles japonaises de ramen ?

En addition de toutes mes bases de l’Institut Paul Bocuse et de mes connaissances personnelles, j’ai fait une formation de ramen dans deux écoles différentes. La Yamato School et la Rajuku School. La Yamato m’a formé sur la conception des nouilles, la fabrication, le processus… La Rajuku est spécialisée pour les bouillons et assaisonnements. A savoir que le ramen est composé de 3 éléments : le tare, l’huile et le bouillon. Le tare c’est l’assaisonnement, l’huile c’est pour apporter le côté gras, onctueux et le bouillon c’est la base, puis les nouilles arrivent ensuite. Ces formations ont duré une semaine chacune. J’ai suivi ces formations en ligne à cause de la période du Corona virus. Ces écoles étant situées au Japon, bien-sûr, j’aurais préféré les faire directement là-bas ! J’ai tout de même suivi la formation de la Yamato School dans leur centre de formation à Rotterdam où j’ai pu me déplacer car c’était en Europe. Cependant, la Rajuku School était en ligne, en live avec le chef. J’ai voyagé au Japon une fois mais juste pour des vacances. J’aurais vraiment aimé y retourner et faire un parcours culinaire, visiter les terres du Japon pour en apprendre sur les spécialités de chaque région.

  • Comment est née la collaboration avec la pâtisserie Tomo ?

Nous ne sommes pas spécialistes des desserts et je voulais proposer une touche japonaise dans mon offre sucrée.

Avec la pâtisserie Tomo, nous partageons la même philosophie de création, c’est-à-dire une base de préparation japonaise en ajoutant la touche française, comme avec leur baba au rhum, la tarte au citron…

Nous avons la même vision et allons faire une collaboration sur place avec eux dès la réouverture. Pour le moment, sur l’offre à emporter, les desserts sont réalisés par ma compagne et moi.

  • Qu’est-ce que tu souhaites transmettre à tes clients ?

Je veux montrer que la cuisine maison et de saison est abordable. Par le prix que je propose, je souhaite prouver que tout le monde peut y accéder et y goûter sans dépenser une fortune. Il est possible de se faire plaisir dans mon restaurant pour une vingtaine d’euros.

Au Japon on mange au comptoir car tout se fait à la seconde, c’est dressé, servi et mangé directement. C’est ce côté-là que je veux partager à mes clients et j’ai donc très hâte de proposer ma cuisine sur place afin de présenter ce concept.

C’est pour cela qu’on a constitué les kits ramen à cuisiner soi-même pour que nos clients puissent retrouver cette cuisson instantanée. Il faut quelques secondes durant lesquelles on peut déguster les nouilles parfaitement cuites. Personnellement, je cuis mes nouilles à 26 secondes et les plongent dans le bouillon très chaud. Pas une seconde de plus, pas une de moins !

rAmen

  • Un plat que tu as gouté et que tu n’as jamais oublié ?

Au Japon, j’ai un autre coup de cœur gastronomique qui est l’okonomiyaki. C’est un plat simple et goûtu que l’on peut aussi, comme les ramen, manger à toute heure. On n’en voit pas beaucoup sur Paris et ce serait un futur projet de restaurant à envisager. J’aimerais proposer l’okonomiyaki comme au Japon, le préparer devant le client sur le tepanyaki et le servir chaud à la minute.

Côté français, c’est l’artichaut de Jérôme Banctel. C’est un mélange des saveurs et des techniques japonaises avec sa touche personnelle. C’est un plat à goûter au moins une fois, alors que de base je déteste ce légume !

Aussi, j’adore cuisiner le miso. En marinade, en soupe, à napper grillé… Il se travaille de toutes les façons, même en dessert, il est possible de le l’utiliser en millier de façons.

  • As-tu des conseils à partager ?

Toujours faire ce qui nous plait au fond de nous. J’ai fait kiné un peu par défaut et ça ne m’a pas réellement plus, même si je suis allé au bout de cette formation. Je me suis tourné vers la cuisine, un domaine que j’aime profondément.

Sans passion tout est plus compliqué, surtout dans le monde de la cuisine ! Faire de la cuisine par défaut et sans amour, c’est presque inimaginable.

 

Je tiens à remercier chaleureusement le chef James Shi pour avoir partagé son parcours et sa vision de la cuisine. Il me tarde de goûter ses plats sur place autour du comptoir, dès la réouverture.


YATAI RAMEN

Adresse :
Yatai Ramen
127, rue du Faubourg Saint-Honoré
75008 Paris

Tél :  01 44 07 22 82
Site web : https://yatairamen.fr/ 

Ouverture :
Du Lundi au Samedi.
De 11h30 à 15h00 et de 18h00 à 21h30.
Fermé le Dimanche.

 

A propos de l'auteur

Irasshaimase ! Passionnée de cuisine nippone, qu’elle soit populaire ou étoilée, je vous partage mes coups de cœur de restaurants japonais et bien plus encore !

4 commentaires

  1. JANINE PEREZ on

    Bravo pour votre article, il a éveillé mon désir de découvrir la diversité de ce plat si populaire au Japon.

  2. Délicieux reportage qui aiguise nos papilles et qui attise encore plus notre impatience de voir le confinement terminer
    Hâte de découvrir ce bel et bon endroit et ce jeune chef au parcours plein promesses

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