samedi 15 mars | 10:01

Sexualité des femmes japonaises : entre tabous et évolutions

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À l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes, intéressons-nous de plus près à un sujet souvent tabou mais essentiel : la sexualité féminine au Japon. Longtemps restée dans l’ombre de conventions sociales strictes, elle semble aujourd’hui progressivement évoluer, portée par les nouvelles générations et une parole féminine de plus en plus affirmée.

Grâce à plusieurs enquêtes récentes réalisées directement au Japon, nous pouvons mieux comprendre ces évolutions à travers quelques données clés.

L’activité sexuelle : un recul confirmé chez les jeunes femmes

Selon une étude récente (2023) menée par la Japanese Association for Sex Education, seulement :

  • 27,5 % des lycéennes japonaises déclarent avoir échangé leur premier baiser.
  • 14,8 % affirment avoir déjà eu une relation sexuelle.

Ces chiffres, historiquement bas, témoignent d’une attitude globalement prudente ou réticente des jeunes femmes japonaises face aux relations intimes.

Vie sexuelle des couples mariés : une activité en berne

Chez les couples mariés, la fréquence des rapports sexuels reste faible. Selon la Japan Family Planning Association (2023) :

  • Les femmes japonaises ont en moyenne 45 rapports sexuels par an, soit environ 0,9 fois par semaine.
  • De plus, environ 47 % des couples mariés n’ont quasiment plus ou plus du tout de rapports sexuels réguliers, souvent pour des raisons liées au stress, au travail, ou encore à une communication défaillante entre partenaires.

Masturbation féminine : une pratique plus assumée ?

Sujet encore délicat, la masturbation féminine connaît néanmoins une progression notable dans sa pratique et son acceptation :

  • En 2019, 42 % des Japonaises âgées de 20 à 40 ans déclarent avoir pratiqué la masturbation au moins une fois au cours des six derniers mois, contre 30 % en 2005.
  • L’âge moyen du premier acte masturbatoire est aujourd’hui de 16,8 ans selon une enquête de 2020.

Naomi Watanabe et Iroha : vers une sexualité féminine sans tabou au Japon

En novembre 2024, la célèbre artiste japonaise Naomi Watanabe a collaboré avec la marque allemande de sextoys Womanizer pour créer une édition spéciale du modèle « Womanizer Liberty 2 ». Cette initiative vise à libérer la parole sur la sexualité féminine au Japon, en encourageant les femmes à explorer leur bien-être intime sans tabou.

Parallèlement, la marque japonaise iroha, développée par TENGA, se consacre à la conception de produits de bien-être intime pour les femmes. Elle propose des articles élégants et discrets, tels que des masseurs personnels et des produits de soin pour la zone intime, visant à promouvoir une approche positive et naturelle de la sexualité féminine.

Ces initiatives reflètent une tendance croissante au Japon visant à normaliser et à célébrer la sexualité féminine, en offrant aux femmes des outils pour leur épanouissement personnel.

Préoccupations et contraception

L’enquête réalisée par la fondation Joicfp en 2023 révèle aussi que :

  • Près d’un tiers des femmes interrogées reconnaissent avoir eu des relations sexuelles sans contraception parce qu’elles n’ont pas osé le demander à leur partenaire, ou que celui-ci a refusé.
  • Environ 60 % seulement des jeunes femmes japonaises affirment utiliser régulièrement une méthode contraceptive, avec une préférence pour les préservatifs (54 %), loin devant la pilule contraceptive (14 %).

Les préoccupations les plus fréquemment citées par les japonaises en matière de sexualité concernent :

  • leur apparence physique, jugée insuffisamment attirante,
  • leur manque de confiance vis-à-vis de leur corps et de leurs organes génitaux,
  • l’incapacité à communiquer ouvertement avec leur partenaire sur leurs désirs et besoins.

Les violences sexuelles au Japon : une réalité préoccupante

Au Japon, les violences sexuelles constituent un enjeu majeur de société, souvent occulté par une image de sécurité publique élevée. Cependant, les statistiques récentes révèlent une réalité alarmante. En 2022, le nombre de consultations liées à la violence conjugale a atteint un record avec 84 496 cas, marquant une augmentation constante depuis 19 ans. Parallèlement, les cas de viols signalés ont augmenté, atteignant 2 711 en 2023, tandis que les attentats à la pudeur se sont élevés à 6 096. Ces chiffres, bien qu’élevés, pourraient sous-estimer l’ampleur réelle du problème, car de nombreuses victimes hésitent à porter plainte en raison de pressions sociales et de la crainte d’être stigmatisées. Face à cette situation, des initiatives telles que des lignes d’assistance téléphonique et des services de consultation en ligne ont été mises en place pour soutenir les victimes et les encourager à dénoncer ces actes.

Des voix féminines libératrices

Face à ces tabous persistants, des femmes courageuses tentent de faire bouger les lignes :

Rokudenashiko : oser parler du corps féminin

Artiste plasticienne de son vrai nom Megumi Igarashi, Rokudenashiko (« mauvaise fille » en japonais) interpelle la société japonaise à travers l’« art vaginal ». Son objectif : dénoncer l’hypocrisie d’une société qui tolère les représentations phalliques, mais réprime fortement la représentation du sexe féminin. Arrêtée pour « obscénité » en 2014 après avoir diffusé des fichiers permettant de reproduire son sexe en 3D, elle continue d’incarner un combat important pour la liberté d’expression féminine.

Ûman ribu : précurseur de la libération sexuelle

Bien avant Rokudenashiko, le mouvement féministe Ûman ribu des années 70 fut l’un des premiers à revendiquer ouvertement le droit à l’autonomie sexuelle des femmes japonaises. En militant pour l’accès à la contraception, le droit à l’avortement et la parole ouverte sur la sexualité, ces militantes ont ouvert la voie à une prise de conscience progressive dont les effets se font encore sentir aujourd’hui.


Une sexualité féminine en quête d’équilibre

Ces données récentes montrent que si les mentalités évoluent, la sexualité féminine au Japon reste encore influencée par des normes sociales et culturelles strictes. Le chemin vers une sexualité pleinement assumée est encore long, mais chaque prise de parole permet peu à peu de briser les tabous.

Et toi, que penses-tu de ces évolutions ? Sens-tu que la parole des femmes japonaises se libère davantage sur ces questions ?

N’hésite pas à partager ton avis en commentaire !

Sources :

  • https://infoslocalesaujapon.org/coin-urgences/prevention-des-violences-sexuelles-au-japon/
  • https://www.nippon.com/fr/japan-data/h01924/
  • https://joicfp.or.jp/srhr/data-srhr/sex-love-survey2023/
  • https://www.jex-sh.jp/pdf/japan_sex_survey/sexsurvey2024.pdf

A propos de l'auteur

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