lundi 15 décembre | 00:34

Le Maître du kabuki : quand l’art devient le véritable héros du film

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Je dois l’avouer : avant même le début de la projection, j’avais quelques appréhensions. Un film sur le kabuki d’une durée de 2h54… Je me suis préparée psychologiquement, me disant que ce serait peut-être long, exigeant, voire difficile à tenir jusqu’au bout. Spoiler : je me trompais complètement.

Le Maître du kabuki m’a tenue en haleine du début à la fin. Mieux encore, lorsque le film s’est achevé, j’ai ressenti une forme de tristesse — celle que l’on éprouve quand on quitte des personnages auxquels on s’est profondément attaché. Les rebondissements sont prenants, les trajectoires humaines bouleversantes, et l’on a sans cesse envie d’en savoir plus, de rester encore un peu dans cet univers.

Au départ, je portais un regard assez dur, presque dans le jugement, sur les personnages principaux. Puis, au fil du récit, une évidence s’est imposée : le véritable personnage central du film n’est pas un homme, mais le kabuki lui-même. Les êtres humains ne sont finalement que ses instruments, ceux par lesquels cet art vit, se transmet, se transforme et perdure.

Cette idée est renforcée de manière remarquable par la réalisation. Le film est magnifiquement tourné, avec un travail très fin sur le point de vue. Tantôt spectateur, tantôt presque acteur, on se retrouve plongé au cœur de la scène. Le regard change constamment : parfois placé dans la salle, parfois sur les planches, parfois dans l’intimité des coulisses. Ce choix n’est jamais gratuit. Il guide nos émotions, oriente notre compréhension et nous fait ressentir, presque physiquement, le poids et la beauté du kabuki.

C’est précisément grâce à ce jeu de points de vue que l’on comprend que ce qui est mis en avant, ce n’est pas l’ego des hommes, mais bien l’art lui-même. Le kabuki domine tout : les corps, les vies, les choix, les renoncements. La mise en scène nous rappelle sans cesse que l’individu s’efface au profit de quelque chose de plus grand que lui.

Le film parle de transmission, de sacrifice, d’héritage et de passion. Il m’a surtout permis de comprendre, de manière très concrète, la notion japonaise de Trésor national vivant. À travers ces destins, on saisit ce que cela signifie réellement : porter un art ancestral, en être le dépositaire, non pas comme un honneur léger à porter, mais comme une responsabilité immense, parfois écrasante.

J’ai pleuré. Pas seulement par émotion, mais parce que le film touche à quelque chose de profondément juste : cette tension permanente entre l’individu et l’art, entre le désir personnel et la nécessité de préserver une tradition qui doit survivre au-delà de soi.

Le Maître du kabuki est, à mes yeux, un petit chef-d’œuvre. Un film exigeant, mais profondément accessible par l’émotion et la beauté de sa mise en scène. Il mérite sincèrement d’être vu, que l’on connaisse déjà le kabuki ou non — peut-être même surtout si on ne le connaît pas encore.


Fiche technique — Le Maître du kabuki

Informations générales

  • Titre : Le Maître du kabuki (国宝 / Kokuho)
  • Réalisation : Sang-il Lee
  • Scénario : Satoko Okudera, d’après le roman Kokuho de Shuichi Yoshida
  • Pays : Japon
  • Année : 2025
  • Durée : 2h54
  • Genre : Drame

Synopsis

Nagasaki, 1964. À la mort de son père, chef d’un gang de yakuzas, Kikuo, âgé de 14 ans, est confié
à un célèbre acteur de kabuki. Aux côtés de Shunsuke, le fils unique de ce dernier, il décide de se
consacrer à cet art traditionnel. Au fil des décennies, les deux jeunes hommes évoluent côte à côte,
entre scandales et gloire, fraternité et trahisons… L’un des deux deviendra le plus grand maître
japonais de l’art du kabuki.

Distribution artistique

  • Ryō Yoshizawa — Kikuo
  • Ryūsei Yokohama — Shunsuke
  • Soya Kurokawa — Kikuo enfant
  • Keitatsu Koshiyama — Shunsuke enfant
  • Mitsuki Takahata — Harue
  • Nana Mori — Akiko
  • Shinobu Terajima — Sachiko
  • Min Tanaka — Mangiku
  • Ken Watanabe — Hanjiro

Équipe technique

  • Musique : Marihiko Hara
  • Image : Sofian El Fani
  • Décors : Yohei Taneda
  • Lumière : Yuki Nakamura
  • Son : Mitsugu Shiratori
  • Montage : Tsuyoshi Imai
  • Costumes : Kumiko Ogawa
  • Chorégraphies : Hirokazu Taniguchi, Tokuyo Azuma
  • Supervision kabuki : Ganjiro Nakamura

Exploitation

  • Sortie France : 24 décembre 2025
  • Distribution : Pyramide
  • Format : DCP
  • Image : 2.39:1 – Couleur
  • Son : 7.1 / 5.1

 

Source : dossier de presse Pyramide.

A propos de l'auteur

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